- SURRÉNALES
- SURRÉNALESLes glandes surrénales furent découvertes en 1543 par B. Eustachi, mais leur rôle n’apparut qu’en 1855 lorsque T. Addison décrivit la maladie bronzée et la rattacha à une destruction de ces glandes. C. E. Brown-Séquard (1856) démontra expérimentalement qu’elles étaient indispensables à la vie. En 1895, Oliver et Schäfer révélaient l’influence hypertensive des extraits surrénaux. En 1901, Takamine et Aldrich isolèrent l’adrénaline , hormone de la partie médullaire de la glande. Ces résultats prouvèrent que les surrénales sont formées en réalité par l’accolement de deux glandes d’origine et de structure distinctes, la corticale et la médullaire. L’isolement (1936-1942) et la synthèse chimique partielle (1946) des hormones corticosurrénales permirent à Hench et Kendall (1949) de les utiliser en thérapeutique, illustrant les efforts conjugués des recherches cliniques et biologiques. Enfin l’aldostérone, la plus puissante des hormones régissant l’équilibre hydrominéral, fut isolée en 1953 par Simpson et synthétisée par Reichstein en 1955.Les glandes surrénales sont situées profondément, de part et d’autre de la colonne vertébrale, et coiffent le pôle supérieur et le bord interne des reins. De forme variable selon les espèces, le plus souvent «en tricorne», elles mesurent chez l’homme environ 3 cm de longueur, 2 cm de hauteur et 1 cm d’épaisseur, et pèsent chacune de 4 à 6 g. La coupe transversale montre qu’il existe dans chaque surrénale deux glandes différentes par leur origine, leur anatomie et leur fonction sécrétoire.La corticale, dont le volume atteint 80 p. 100 de la glande entière, est épaisse de quelques millimètres et de consistance ferme; elle prend une teinte plus foncée à sa partie interne, et se sépare de la médullaire par un liseré brunâtre. Elle provient de l’épithélium cœlomique du mésoblaste intermédiaire, qui fournit également les glandes génitales et les reins.La médullaire, d’origine ectodermique, est une véritable émanation du système nerveux. Elle dérive, en effet, de l’ébauche primitive du sympathique, dont les éléments cellulaires, les sympathogonies, émigrent jusqu’à l’ébauche de la corticosurrénale, s’y regroupent, et constituent la médullosurrénale. Ces cellules contiennent de fines granulations colorables par le bichromate de potassium ou le perchlorure de fer, d’où leur nom de cellules chromaffines . Elles existent également en dehors de la médullosurrénale. De couleur gris perle ou rosée, la médullaire est entièrement circonscrite par le cortex.Les deux glandes surrénales sont solidement fixées à la paroi postérieure de la cavité abdominale par leur gangue fibro-adipeuse, par leurs vaisseaux et par leurs nerfs. Très richement vascularisées, elles sont innervées par un réseau dense issu, d’une part, du grand splanchnique et, d’autre part, du plexus solaire, ce qui correspond bien à l’étroite synergie endocrino-nerveuse qui régit leur fonction et leur action.Depuis plusieurs années, on s’attache, grâce aux acquisitions de la biologie moléculaire et aux progrès de la physiologie cellulaire, à élucider les mécanismes d’action des hormones, notamment des stéroïdes, non seulement au niveau des organes cibles, mais surtout au niveau de la cellule et de ses macromolécules. Il semble donc que l’endocrinologie traditionnelle s’oriente actuellement vers l’endocrinologie moléculaire. Ces travaux ont abouti à édifier des modèles, que les recherches tendent à perfectionner, permettant d’expliquer la physiologie des glandes surrénales, le métabolisme et le mécanisme d’action des hormones surrénales, dans la perspective de l’investigation clinique (exploration fonctionnelle) et de la thérapeutique des dysfonctionnements surrénaliens (en endocrinothérapie).1. CorticosurrénaleStructure histologiqueLa substance corticale est constituée par de nombreuses travées cellulaires séparées par des espaces conjonctifs où circulent des capillaires. Elle se répartit, de la superficie vers la profondeur, en trois zones (fig. 1):– La zone glomérulée , ainsi nommée du fait que les travées sont pelotonnées sur elles-mêmes et recourbées en arc ou en croix, donnant en de nombreux points un aspect de pseudo-glomérules, est constituée de petites cellules, très polymorphes, cubiques ou arrondies, et dont le protoplasme peu coloré contient des granulations lipoïdes. Elle sécrète l’aldostérone.– La zone fasciculée , plus importante, est formée de grandes cellules polyédriques disposées en travées parallèles (colonnes de Kölliker) qui vont de la périphérie vers le centre de la glande. Leur cytoplasme est envahi de gouttelettes graisseuses contenant des lécithines et du cholestérol, précurseur des hormones. Cet aspect spongieux correspond à la partie moyenne de la zone fasciculée. Sa partie externe comporte une mince couche de cellules plus petites, non vasculaires, où l’on retrouve quelques figures de mitoses.– La zone réticulée , couche la plus interne, est faite de cordons de cellules cubiques anastomosées en réseau. Entre les cellules courent de nombreux capillaires fortement dilatés.Les zones fasciculée et réticulée sont responsables de la biosynthèse et de la sécrétion des glucocorticostéroïdes et des androgènes.L’armature conjonctive de la corticosurrénale est constituée par du collagène et par des fibres argentaffines dépendant de cellules assez analogues aux cellules de Küpffer du foie. À l’inverse de la médullaire, le cortex ne possède aucune innervation propre.L’étude histochimique révèle, en dehors des réserves lipidiques, la richesse en acide ascorbique, en particulier dans la zone réticulée et la partie interne de la fasciculée.PhysiologieLe rôle physiologique des corticosurrénales est mis en évidence par l’étude des effets de la surrénalectomie, d’une part, et des surdosages expérimentaux ou observés en pathologie, d’autre part. La notion fondamentale que l’on peut d’emblée dégager est que ces glandes endocrines sont indispensables à la vie.Effets de la surrénalectomieL’ablation simultanée des deux surrénales chez les animaux ou chez l’homme (à titre thérapeutique) engendre après vingt-quatre à quarante-huit heures un état de prostration, une asthénie intense, des vomissements, de la diarrhée, de l’hypothermie, une chute progressive de la pression artérielle évoluant vers le coma et la mort en l’absence de traitement substitutif d’urgence par le cortisol et du traitement symptomatique du collapsus.On rencontre l’insuffisance surrénale lente chez l’homme atteint de la maladie d’Addison , qui associe un syndrome clinique (mélanodermie, asthénie, hypotension artérielle, amaigrissement, troubles gastro-intestinaux) à un syndrome biologique caractéristique: hémoconcentration, hyponatrémie, hyperkaliémie, retard à l’élimination de l’eau, fuite du sodium, rétention du potassium et hyperhydratation intracellulaire, conséquence de la fuite sodique et de la rétention du potassium. En outre, la carence hormonale se manifeste au niveau de tous les métabolismes: glucidique (hypoglycémie avec hypersensibilité à l’insuline, diminution des réserves glycémiques du foie, diminution de la néoglucogenèse), protéique (bilan azoté négatif, accroissement du catabolisme), lipidique (diminution de la mobilisation des réserves). Ces troubles sont corrigés par l’administration de sel et surtout d’hormones substitutives: extraits glandulaires, désoxycorticostérone, cortisol.Effets du surdosageOn peut réaliser expérimentalement les effets du surdosage par injections répétées d’extraits glandulaires, mais l’étude de la pathologie des tumeurs surrénales permet de mieux distinguer les symptômes des hyperfonctionnements corticosurrénaliens: un syndrome métabolique , du type Cushing, associant à une obésité une hypertension et un diabète sucré, liés, comme le montrent les dosages biologiques, à une hypersécrétion de cortisol; un syndrome minéral caractérisé par une rétention du sodium et une fuite du potassium, témoins de l’hyperaldostéronisme; un syndrome virilisant dû à l’hypersécrétion d’androgènes.Métabolisme et mode d’action des hormones corticosurrénalesLa corticosurrénale sécrète trois types d’hormones: les glucocorticoïdes, dont le chef de file est le cortisol ; les minéralocorticoïdes, assurant la régulation de l’équilibre hydrominéral et dont le plus actif est l’aldostérone ; enfin les androgènes.Tronc communLa biosynthèse des hormones surrénales de nature stéroïdique a lieu dans les trois zones histologiques, à partir du cholestérol, par un ensemble de réactions biochimiques formant un «tronc commun» (fig. 2).Le cholestérol, vraisemblablement plasmatique, grâce à deux hydroxylases NADPH dépendantes, est transformé en 20 見, 22 ( 見 ou 廓)-dihydroxycholestérol. Celui-ci, scindé par une desmolase, donne un composé en C21, la prégnénolone, tandis que de l’acide isocaproïque est libéré dans le milieu. La prégnénolone (ou hydroxy-3 廓 prégnèn-5 one-20) subit ensuite une oxydation en C-3, accompagnée d’une isomérisation faisant passer la double liaison de C-5-C-6 à C-4-C-5, et devient la progestérone (prégnène-4 dione-3,20). Prégnénolone et progestérone sont les deux substrats utilisés par les voies métaboliques pour la biosynthèse des diverses hormones surrénales.CortisolBiosynthèseLe cortisol (trihydroxy-11 廓,17 見,21 prégnène-4 dione-3,20) est le chef de file des hormones glucocorticostéroïdes, groupe auquel appartient également la corticostérone. La biosynthèse du cortisol a lieu principalement dans la zone fasciculée soit à partir de la progestérone par une voie métabolique principale, soit à partir de la prégnénolone par une voie accessoire. La voie principale implique trois hydroxylations successives de la progestérone par des hydroxylases NADPH dépendantes, pour lesquelles la présence d’oxygène moléculaire est indispensable: la première en C-17 conduit à la 17 見-hydroxyprogestérone; la deuxième en C-21 est responsable de la synthèse de la 17,21-dihydroxyprogestérone ou 11-désoxycortisol (composé S de Reichstein); la troisième en C-11, spécifiquement surrénale, engendre le cortisol. La 11 廓-hydroxylase, inhibée in vitro et in vivo par la métopirone, est indispensable pour permettre au cortisol d’exercer son effet rétrorégulateur sur le système hypothalamo-hypophysaire.La voie accessoire fournit la 17 見,21-dihydroxyprégnénolone, qui, sous l’action de la 3 廓-hydroxystéroïde oxydoréductase et de la (54) isomérase, donne le 11-désoxycortisol, puis le cortisol.Régulation de la sécrétion du cortisolLa sécrétion du cortisol, de l’ordre de 20 mg par jour, est sous le contrôle de l’axe hypothalamo-hypophysaire, notamment de l’ACTH (adrenocorticotrophic hormone , ou corticotrophine) dont la glande cible est la corticosurrénale. L’hypophysectomie entraîne, en effet, l’atrophie du cortex surrénalien, mais non de la médullaire. En outre, l’injection d’ACTH dans une veine périphérique stimule la sécrétion du cortisol, d’aldostérone et accessoirement d’androgènes surrénaliens.La sécrétion de l’ACTH est réglée par les glucocorticoïdes grâce à deux mécanismes fondamentaux (fig. 3).Le premier mécanisme (rétrocontrôle ou feedback ) met en jeu le taux de cortisol libre plasmatique. Une baisse de ce taux stimule la sécrétion de l’ACTH; par contre, un excès de cortisol bloque la sécrétion de l’ACTH, et en conséquence celle des corticostéroïdes.Le second mécanisme, plus rapide, intervient essentiellement en cas d’agression (stress) et implique l’intervention d’afférences nerveuses provenant du cortex cérébral. Le stress – qu’il soit de nature physique (froid, chaleur...), psychologique (peur, fatigue...), pathologique ou chirurgicale – est à l’origine d’une hyperactivité de la corticosurrénale. Le système régulateur implique l’intervention d’un peptide d’origine hypothalamique, le CRF (corticotropin releasing factor ), qui gagne l’hypophyse antérieure par l’intermédiaire du système porte hypophysaire et déclenche le passage de l’ACTH dans le sang. Le cortisol sécrété en excès inhibe simultanément la libération des stimulines au niveau de l’hypophyse antérieure et celle du CRF au niveau de l’hypothalamus.Transfert du cortisolLe transport du cortisol vers les récepteurs se fait dans le plasma par liaison soit avec la sérum-albumine, soit avec une 見1-glycoprotéine de poids moléculaire 52 000, appelée CBG (corticosteroid binding globulin , ou transcortine), mais seule la fraction libre est active au point de vue biologique. La CBG est présente dans le plasma à une concentration de 30 mg/l environ, ce qui correspond à trois fois plus de sites qu’il n’en faut pour lier 100 ng/ml de cortisol (taux normal). Toute élévation du niveau du cortisol plasmatique, par exemple dans la maladie de Cushing, sature la transcortine et, par suite, accroît la proportion du cortisol lié à la sérum-albumine et celle du stéroïde libre. La transcortine transporte le cortisol actif, non conjugué, et le protège de l’inactivation hépatique. Les œstrogènes, pendant les derniers mois de la grossesse, ainsi que les contraceptifs augmentent la biosynthèse de la CBG.Action et mécanisme d’action du cortisolLe mécanisme d’action du cortisol au niveau des cibles est la résultante d’effets anaboliques au niveau du foie, cataboliques au niveau des tissus périphériques (tissus lymphoïdes, musculaires, etc.).– Action sur le métabolisme glucido-protéique au niveau du foie . L’injection de cortisol détermine une hyperglycémie qui résulte, d’une part, de l’inhibition de la fixation du glucose par les tissus périphériques et, d’autre part, d’une stimulation de la néoglucogenèse et de la glycogénogenèse hépatiques. En effet, le cortisol et, à un plus faible degré, la corticostérone exercent une action importante sur le métabolisme des glucides, d’où leur nom de glucocorticoïdes. Ils induisent la synthèse de nombreuses enzymes hépatiques impliquées dans le métabolisme des acides aminés (tryptophane oxydase, tyrosine aminotransférase, thrèonine-sérine désaminase, alanine-glutamate transférase), et surtout dans la néoglucogenèse et la glycogénogenèse (pyruvate carboxylase, phosphoénolpyruvate carboxykinase, fructose diphosphatase, glucose 6-phosphatase, glycogène synthétase). La néoglucogenèse s’effectue à partir des acides aminés glucoformateurs dont le taux augmente dans le sang après administration de cortisol. Ils proviennent du catabolisme des protéines des tissus musculaire, osseux, lymphoïde, conjonctif. En revanche, l’activité de la glycogène phosphorylase est réduite. On peut dire que le cortisol se comporte comme un antagoniste de l’insuline.Il est possible que le cortisol, après pénétration dans le noyau sous forme d’un complexe hormone-récepteur, agisse au niveau de l’ADN de la cellule hépatique en déréprimant des gènes spécifiques pour la synthèse des enzymes clés de la néoglucogenèse. Le cortisol induirait, de ce fait, les enzymes de la glucoformation, alors que l’insuline agirait en inducteur de celles de la glycolyse et en suppresseur de celles de la néoglucogenèse. Ce modèle a été particulièrement critiqué, car la régulation de la biosynthèse des enzymes hépatiques n’explique pas à elle seule tous les effets du cortisol.– Action sur le métabolisme hydrominéral et le métabolisme des lipides . Le cortisol et la corticostérone agissent sur le métabolisme hydrominéral différemment de l’aldostérone. Ils accroissent la filtration glomérulaire, le flux plasmatique rénal et l’excrétion tubulaire maximale. L’action du cortisol est antagoniste de celle de l’hormone antidiurétique (ADH).L’excès permanent de cortisol entraîne l’hyperlipémie et une obésité avec augmentation élective du tissu adipeux au niveau de la face, du cou, du tronc et de la racine des membres.Dans la plupart des cas, le cortisol n’agirait pas directement, mais il favoriserait l’action d’autres hormones, telles les catécholamines et le glucagon.– Action sur les tissus périphériques . À la périphérie, on assiste à une accélération du catabolisme et à des effets antianaboliques. L’entrée du glucose dans le thymus, dans la peau, dans le tissu adipeux et dans les muscles est ralentie (les récepteurs hépatiques et thymiques sont bien caractérisés); en outre, sa phosphorylation en glucose 6-phosphate et son oxydation diminuent. On observe également une baisse du transport des acides aminés dans les cellules, une inhibition de leur incorporation dans les protéines et un accroissement du catabolisme protéique. Ces effets se traduisent par une libération accrue d’acides aminés dans le sang, ce qui favorise la néoglucogenèse hépatique et l’hyperglycémie par défaut d’utilisation du glucose.Le cortisol (hydrocortisone) et les stéroïdes de synthèse, tels que le 9 見-fluorocortisol, le 1-cortisol, le 2-méthyl 9 見-fluorocortisol, le 16 見-méthyl 9 見-fluoro 1-cortisol, possèdent des propriétés anti-inflammatoires utilisées en thérapeutique. En effet, ces substances inhibent la diapédèse, c’est-à-dire le passage de leucocytes du sang vers le foyer inflammatoire, et la prolifération des fibroblastes (cf. processus INFLAMMATOIRE). Ces propriétés pourraient s’expliquer par une action protectrice sur les membranes des lysosomes.Les effets sur les réactions immunitaires (allergie, rejet de greffe) s’expliqueraient par l’action des corticostéroïdes sur les cellules immunocompétentes de certains tissus périphériques. Enfin, la sécrétion de la corticotrophine est inhibée.Le mécanisme cellulaire d’action du cortisol n’est pas complètement élucidé. Dans les cellules cibles, l’hormone se fixe à des protéines cytoplasmiques (récepteurs), et le complexe stéroïde-récepteur apparaît dans le noyau. L’inhibition du transport du glucose dans les cellules entraînerait secondairement les autres effets par défaut de synthèse d’ATP. Cette inhibition semble succéder à la formation du complexe hormone-récepteur et dépendre de la synthèse d’une protéine succédant à celle de l’ARN.Catabolisme du cortisolL’inactivation du cortisol est surtout réalisée dans le foie (fig. 4). Les réductions intervenant dans la molécule du cortisol se font successivement et sont essentielles: la saturation de la double liaison conduit aux dihydrodérivés, celle de la fonction cétonique en C-3 aux tétrahydrodérivés, celle de la fonction cétonique en C-20 aux hexahydrodérivés. Ces réactions sont catalysées par des réductases NADPH dépendantes, qui inactivent aussi bien le cortisol que la cortisone en équilibre dans le sang périphérique. Elles peuvent n’atteindre dès le départ que la fonction cétonique en C-20 et former des dihydrodérivés conservant les groupements fonctionnels èn-4 one-3. Une petite fraction des métabolites hexahydrodérivés est ensuite clivée par une desmolase et donne naissance à des 17-cétostéroïdes. Enfin, les hydroxylations en C-6 廓, physiologiquement rares, deviennent plus fréquentes pendant la grossesse ou au cours de certaines thérapeutiques. Cette inactivation est complétée dans le foie par la conjugaison des catabolites à l’acide glucuronique (95 p. 100) et à l’acide sulfurique (5 p. 100).On évalue habituellement l’excrétion urinaire du cortisol libre et de ses métabolites libres et surtout conjugués en dosant les 17-hydroxycorticostéroïdes dans les urines émises en vingt-quatre heures. Quantitativement, les tétrahydrodérivés représentent environ 25 p. 100 du cortisol sécrété, les hexahydrodérivés 30 à 40 p. 100, les 17-cétostéroïdes environ 3 p. 100.Mesure du taux de production du cortisolLe taux de production est déterminé par injection d’une hormone radioactive, suivie du recueil des urines quarante-huit heures après. On sait, en effet, d’une part, que le cortisol est le précurseur exclusif des produits du catabolisme, tels que le glucuronide de tétrahydrocortisol, que l’on peut isoler des urines chez le sujet normal; et, d’autre part, que ce métabolite ne dérive d’aucune autre hormone stéroïde. Le cortisol radioactif injecté se dilue donc avec le cortisol sécrété, et son métabolite radioactif est éliminé après quarante-huit heures. Le taux de production (TP) est donné par le rapport entre la radioactivité injectée et l’activité spécifique du métabolite multipliée par le nombre de jours.Cependant, la sécrétion du cortisol n’est pas continue et évolue par «bouffées» selon un rythme circadien; elle atteint son maximum à huit heures du matin chez un sujet ayant un rythme de vie normal, et se réduit notablement à la fin de la journée, d’où une imprécision dans la mesure du taux de production. Cette discontinuité entraîne éventuellement une inégalité significative entre les activités spécifiques de deux métabolites exclusifs, tétrahydrocortisone et tétrahydrocortisol, par exemple, alors que la théorie montre qu’elles devraient être égales dans le cas le plus simple.Il est à noter que, d’après certains auteurs, le terme de «taux de sécrétion» s’applique uniquement à la mesure non des métabolites mais des composés directement sécrétés par la surrénale, c’est-à-dire ceux qui sont isolés dans le sang veineux surrénalien. On parle aussi de taux de production quand la synthèse d’un composé a lieu au niveau d’autres organes, tels que le foie.AldostéroneL’aldostérone est l’hormone qui a la plus grande activité minéralocorticotrope.BiosynthèseLa biosynthèse (fig. 2) se fait dans la zone glomérulée à partir de la progestérone, et débute par une hydroxylation en C-21 conduisant à la désoxycorticostérone (DOC), dont l’acétate ou DOCA est utilisé en thérapeutique. La DOC est hydroxylée en 11 廓 et donne la corticostérone ou composé B. Cette dernière est hydroxylée en C-18 et la 18-hydroxycorticostérone est oxydée en C-18, ce qui conduit à l’aldostérone en équilibre avec la forme cyclique (1118) semi-acétalique.SécrétionLa sécrétion est de 200 猪g par vingt-quatre heures. Elle fait intervenir non pas l’antéhypophyse, mais le couple rénine-angiotensine. La rénine, enzyme protéolytique sécrétée par les cellules de la macula densa , est libérée sous l’influence de stimuli atteignant les capillaires juxtaglomérulaires: diminution de la volémie (volume sanguin), fuite du sodium, rétention du potassium. Cette enzyme libère dans le plasma, à partir d’une 見2-globuline (angiotensinogène), un décapeptide, l’angiotensine I, qui par perte de deux acides aminés fournit l’angiotensine II active (Asp-Arg-Val-Tyr-Ile-His-Pro-Phe). Celle-ci commande la libération surrénale d’aldostérone, dont l’effet se manifeste au niveau du tube distal par une rétention du sodium, donc de l’eau, pour s’opposer aux troubles de la volémie [cf. ALDOSTÉRONE].Action de l’aldostérone sur le métabolisme hydrominéralL’aldostérone, administrée à forte dose, provoque chez les sujets normaux une rétention de sodium, une légère hypernatrémie, une prise de poids, une augmentation du volume du sang et une fuite urinaire du potassium. Cependant, au bout de quelques jours, la diurèse sodée et hydrique s’équilibre avec les apports, alors que la fuite du potassium se poursuit. L’action de l’aldostérone s’exerce au niveau du tube distal, où elle commande la réabsorption par transport actif de Na+ et de H+.Contrairement au cortisol, l’aldostérone, aux doses physiologiques, n’exerce pas d’effet sur la rétention d’eau. Elle ne se comporte pas comme un antagoniste de l’hormone antidiurétique pour la réabsorption tubulaire de l’eau. L’aldostérone en excès entraîne une augmentation du sodium et de l’eau extracellulaire. L’expansion du volume plasmatique qui en résulte élève la pression artérielle et le débit sanguin.En outre, l’hypernatrémie altère l’excitabilité des neurones cérébraux; l’hypokaliémie est toxique pour le muscle cardiaque.Mécanisme d’action de l’aldostérone sur le transport du sodiumL’étude du mécanisme d’action de l’aldostérone sur le transport du sodium, réalisée soit in vivo au niveau des reins de rat, soit in vitro en utilisant la vessie de batracien, a montré que le complexe aldostérone-récepteur pénètre dans le noyau cellulaire. En outre, la stimulation du transport de Na+ n’est pas concomitante de l’injection d’aldostérone; elle se produit avec un délai de quarante à cent vingt minutes. Ce délai suggère que le transport actif de Na+ nécessite la synthèse d’un ou de plusieurs intermédiaires. En outre, dans les noyaux des cellules cibles, l’aldostérone accélère la synthèse d’ARN.La réabsorption du sodium sous l’action de l’aldostérone est un processus actif. Le fonctionnement de la « pompe » à sodium, localisée dans la membrane des cellules épithéliales, nécessite une adénosine phosphatase (ATPase) et un fournisseur d’énergie, l’ATP. Deux mécanismes de transport actifs sont possibles:– Effet sur la synthèse d’ATP et activation de la pompe à sodium : l’action de l’aldostérone sur le transport de sodium requiert, d’une part, de l’acide oxaloacétique et de l’acétylcoenzyme A (précurseurs du cycle de Krebs), et, d’autre part, de l’oxygène moléculaire. L’interprétation est que le cycle de Krebs libère des molécules de NADH. Ces coenzymes, transférées sur la chaîne respiratoire dans les mitochondries, régénèrent à leur tour par phosphorylation oxydative trois molécules d’ATP (cf. MÉTABOLISME, fig. 2), qui seront utilisées par la pompe à sodium. L’activation de la pompe serait due soit à la synthèse de molécules d’ATPase, soit à l’activation de celles-ci par une protéine induite par l’aldostérone.– Augmentation de la perméabilité cellulaire : une «perméase», dont la synthèse serait stimulée par l’aldostérone, faciliterait le passage du sodium au pôle muqueux de la cellule.TransportLe transport de l’aldostérone vers les cibles est réalisé par une protéine vectrice et par la sérum-albumine.CatabolismeL’aldostérone est catabolisée dans le foie, grâce à des réductases qui atteignent d’abord la double liaison, puis la fonction cétonique en C-3, formant ainsi la tétrahydroaldostérone, catabolite majeur (fig. 5). Une faible fraction d’aldostérone libre et conjuguée est éliminée dans les urines: 18-glucuroconjugué de l’aldostérone (10 猪g/j) et 3-glucuroconjugué de la tétrahydroaldostérone (20 à 40 猪g/j). Les dosages de ces métabolites sont habituellement suffisants pour juger de la fonction minérale des surrénales.Androgènes surrénaliensLes androgènes surrénaliens sont synthétisés dans les zones fasciculée et réticulée (fig. 2). Là encore, la prégnénolone et la progestérone sont les substrats d’abord d’une hydrolase, puis d’une desmolase. Celle-ci coupe la chaîne latérale de la 17-hydroxyprégnénolone et aboutit à la déhydroépiandrostérone ou à l’androstènedione. La déhydroépiandrostérone est convertie en androstènedione par un système enzymatique NAD+ dépendant, comportant de plus une (54) isomérase. L’androstènedione peut être hydroxylée en C-11 廓 et fournit les hydroxy-11 廓 17-cétostéroïdes: la 11-hydroxyandrostènedione est en équilibre avec la 11-cétoandrostènedione, ou adrénostérone. Enfin, les surrénales sécrètent de très faibles quantités de testostérone (0,2 mg/j). En revanche, la sécrétion surrénalienne d’androstènedione est plus importante chez la femme (3 à 4 mg/j) que chez l’homme (1 à 2 mg/j).Une voie de biosynthèse utilisant la filiation: sulfate de cholestérol, sulfate de prégnénolone, sulfate de déhydroépiandrostérone, existe également, mais elle semble quantitativement peu importante. 10 à 20 milligrammes de sulfate de déhydroépiandrostérone sont sécrétés par la surrénale, un peu plus chez l’homme que chez la femme. Le taux de production diminuant avec l’âge, il pourrait être possible, par leur usage, de combattre certains effets du vieillissement selon E. E. Baulieu et S. Yen.La biosynthèse des androgènes surrénaliens est sous la dépendance de l’ACTH; ils n’exercent aucun effet rétrorégulateur au niveau du système hypothalamo-hypophysaire.Le catabolisme a lieu dans le foie (fig. 6). Le sulfate de déhydroépiandrostérone (S-DHA ou S-DHEA) est partiellement éliminé sans modification de structure (15 p. 100 des 17-cétostéroïdes). La plus grande partie est hydrolysée dans le foie par la sulfatase et donne naissance à la déhydroépiandrostérone (DHA). La DHA est en majorité irréversiblement oxydée en androstènedione. L’androstènedione, d’origine surrénalienne et gonadale, ainsi que la testostérone sont en équilibre d’oxydoréduction. Finalement, la plus grande partie des catabolites de la S-DHA et de la testostérone seront donc ceux de l’androstènedione, et par conséquent les 17-cétostéroïdes (17-CS). Une conjugaison à l’acide glucuronique ou à l’acide sulfurique précède l’élimination urinaire des 17-CS: de 9 à 17 mg par vingt-quatre heures chez l’homme, de 7 à 9 mg chez la femme.Fondamentalement, les androgènes surrénaliens ne sont pas virilisants. Sécrétées en très grand excès, la déhydroépiandrostérone et surtout l’androstènedione peuvent être converties dans le foie ou dans les organes cibles en (5 見) métabolites actifs. La déhydroépiandrostérone est le précurseur des œstrogènes placentaires.Les (5 廓) catabolites des androgènes ont une activité biologique tout à fait différente. On a montré que la (5 廓) androstérone induit la synthèse des porphyrines par le foie embryonnaire en culture. Plusieurs (5 廓) métabolites des androgènes sont pyrogènes chez l’homme après administration parentérale (25 mg et plus). Le mécanisme de cet effet semble lié à une décharge de pyrogènes leucocytaires. Un test de réserve des leucocytes a été décrit, mettant à profit ces propriétés des (5 廓) catabolites.Ainsi, il est devenu tout à fait évident que le catabolisme des androgènes, loin de servir uniquement à l’inactivation hormonale, peut au contraire être indispensable à l’expression de leurs activités biologiques.Exploration fonctionnelle des corticosurrénalesL’exploration fonctionnelle de la surrénale comprend des investigations humorales et hormonales statiques et dynamiques concernant la surrénale elle-même, mais aussi l’axe hypophysosurrénalien. Ces investigations sont effectuées chez le patient au repos, exempt de toute thérapeutique, et soumis à un régime alimentaire équilibré.Exploration humoraleL’exploration humorale statique consiste à doser le glucose, le sodium, le potassium, les ions chlore et bicarbonates dans le sang et dans les urines.L’exploration humorale dynamique comprend essentiellement trois épreuves portant sur les conséquences métaboliques d’un dysfonctionnement surrénalien: l’épreuve de l’eau de Robison (après absorption de 10 ml d’eau par kilogramme de poids, les deux tiers de cette eau sont normalement éliminés en quatre heures, et on observe une dilution transitoire des urines); l’hyperglycémie provoquée , et le régime désodé ou surchargé en potassium . Ce test, très dangereux en cas d’insuffisance surrénale sévère, est destiné à mettre en évidence un trouble de la sécrétion d’aldostérone.Exploration hormonaleL’exploration hormonale est indispensable pour l’établissement de tout diagnostic et pour tout traitement concernant la corticosurrénale.Exploration statiqueL’exploration statique comprend le dosage, dans le sang et les urines, des stéroïdes hormonaux et de leurs métabolites: dans le sang, dosage du cortisol (de 5,8 à 18,2 猪g/100 ml à huit heures du matin); dans les urines de vingt-quatre heures, dosage des 17-hydroxycorticostéroïdes (de 4 à 6 mg), dosage des 17-cétostéroïdes (de 9 à 17 mg chez l’homme, de 5 à 14 mg chez la femme) et des conjugués de l’aldostérone. Un dosage du prégnandiol ou du prégnanetriol peut être utile en cas de virilisme, ou au contraire un dosage des œstrogènes en cas de syndrome féminisant.La mesure du taux de production des hormones constitue le moyen le plus direct et le plus incontestable de juger de la qualité de la sécrétion surrénalienne. Après injection intraveineuse d’hormones radioactives, on détermine la radioactivité spécifique d’un de leurs métabolites dans les urines (cf. supra , Mesure du taux de production du cortisol ).On dose également les hormones protéiques qui agissent sur l’activité surrénalienne par un dosage de l’activité rénine plasmatique (les résultats sont exprimés en nanogrammes d’angiotensine formée par litre de plasma et par minute d’incubation, soit 8 ng/1/mn chez un sujet recevant un régime normalement sodé) et par un dosage de l’ACTH hypophysaire par radio-immunologie [cf. RADIO-IMMUNOLOGIE].Exploration dynamiqueLes épreuves fonctionnelles d’exploration dynamique sont essentielles soit pour confirmer un diagnostic, soit pour déceler une anomalie biologique.a ) Épreuve de stimulation par l’ACTH. La perfusion ou l’injection intramusculaire de corticotrophine élève normalement de 100 à 200 p. 100 le taux des 17-cétostéroïdes et de 400 p. 100 celui des 17-hydrocorticostéroïdes, tandis que double le taux du cortisol plasmatique. Ces épreuves testent la réactivité de la surrénale et sa capacité de réserve hormonale. Elles servent donc à révéler ou à confirmer les hypofonctionnements ou les hyperfonctionnements surrénaliens.b ) Exploration de l’axe hypophyso-hypothalamique. Certaines épreuves de stimulation ont été mises au point pour explorer l’axe hypophyso-surrénalien:– Test à la métopirone : La métopirone bloque la 11-hydroxylation, empêchant la production de cortisol par la surrénale. La suppression de la synthèse du cortisol engendre normalement une augmentation de la sécrétion d’ACTH. L’ACTH sécrétée en excès stimule la surrénale et fait par suite libérer à celle-ci des quantités accrues de 11-désoxycortisol (précurseur direct du cortisol) que l’on dose dans le plasma. Ce test permet donc d’apprécier la sécrétion de l’ACTH endogène dans la mesure où la surrénale est saine. Il permet de mettre en évidence l’origine hypophysaire d’une insuffisance surrénale. Plus fréquemment, on dose dans les urines le tétrahydro 11-désoxycortisol, catabolite du 11-désoxycortisol.– Test au CRF : Ce test consiste en la perfusion veineuse de CRF. Le résultat est jugé vingt-quatre heures après le test par l’augmentation du taux des 17-hydroxy-corticostéroïdes dans les urines.– Test à la lysine-vasopressine : Il s’agit d’une vasopressine synthétique possédant des propriétés analogues à celles du CRF. Son action sur l’hypophyse libère de l’ACTH. On dose le taux de cortisol dans le sang. Le couplage de ce test avec celui à la métopirone permet de distinguer une insuffisance hypophysaire.c ) Épreuves de freinage. L’administration de corticostéroïdes de synthèse freine par rétrocontrôle la sécrétion de l’ACTH hypophysaire et, de ce fait, la stimulation physiologique de la surrénale, dont l’activité sécrétoire est abaissée. La réponse de la surrénale est jugée sur les urines. L’administration de 3 mg de dexaméthasone pendant cinq jours provoque une chute du taux des corticostéroïdes aux alentours de 1 mg et un abaissement des 17-cétostéroïdes au-dessous de 3 mg chez la femme et de 6 mg chez l’homme.2. MédullosurrénaleLa médullosurrénale est une entité endocrine distincte de la corticale. Elle n’est pas indispensable à la vie. Elle est constituée de cellules sécrétives chromaffines (cf. supra ), et sécrète les catécholamines (adrénaline et noradrénaline). Ces produits ne sont pas propres à cette glande, puisque les ganglions sympathiques en constituent une autre source.PhysiologieLes actions physiologiques de l’adrénaline et de la noradrénaline sont ubiquitaires. Leurs effets sur le cerveau, le cœur et la circulation, sur les muscles lisses du tractus gastro-intestinal, de l’œil, des bronches, sur le système nerveux central, le muscle squelettique, la coagulation sanguine, la rate, sur la redistribution des calories mises en réserve dans l’organisme sont riches et variés; ils ont pour objectif commun la mobilisation de l’organisme pour lutter contre une situation de détresse.Des ordres nerveux commandant la décharge d’adrénaline sont acheminés à partir de récepteurs tactiles sensibles au froid ou à la douleur, d’autres partent des barorécepteurs du système circulatoire. Des états émotionnels peuvent également engendrer la libération hormonale. De plus, les changements de composition chimique du sang (manque d’oxygène, hypoglycémie, anesthésiques généraux, toxiques) représentent des stimuli efficaces.Métabolisme des catécholaminesBiosynthèseLa biosynthèse des catécholamines se fait à partir de la L-tyrosine fournie soit par l’alimentation, soit par hydroxylation de la phénylalanine dans le foie (fig. 7). L’hydroxylation de la tyrosine conduit à la 3,4-dihydroxyphénylalanine ou DOPA. C’est l’étape limitante de la biosynthèse, car toute inhibition de l’hydroxylase retentit sur la quantité d’adrénaline produite et sur son stockage. La DOPA est décarboxylée en dopamine, ou dihydroxyphényléthylamine. Celle-ci, transportée activement dans les granules cytoplasmiques qui contiennent la dopamine oxydase, enzyme renfermant du cuivre, est oxydée en noradrénaline. La pénétration de la dopamine à travers la membrane des granules serait le véritable facteur limitant de la chaîne biosynthétique. La noradrénaline et l’adrénaline interviendraient ensuite pour régler par rétrocontrôle l’activité de la tyrosine hydroxylase. Les granules cytoplasmiques contiennent également la N-méthyltransférase responsable de la transformation de la noradrénaline en adrénaline. On pense actuellement que, pour être méthylée, la noradrénaline doit sortir des granules. En outre, le cortisol est nécessaire à la méthylation, ce qui peut expliquer que la médullosurrénale fabrique plus d’adrénaline que de noradrénaline.CatabolismeLes catécholamines sont inactivées par dégradation enzymatique, en particulier par la catéchol-O-méthyltransférase et la mono-amine oxydase, au niveau des organes effecteurs et surtout au niveau du foie (fig. 7). La catéchol-O-méthyltransférase, enzyme du plasma, du foie, des reins, interviendrait principalement dans l’inactivation des métabolites circulants; en revanche, la mono-amine oxydase agirait secondairement sur les métanéphrines. S’il est difficile de préciser l’importance respective des deux enzymes, on remarque cependant que les dérivés O-méthoxylés (formés sous l’action de la catéchol-O-méthyltransférase) se trouvent dans les urines et peuvent être éliminés sous forme glucuroconjuguée ou sulfoconjuguée; ainsi, l’acide vanillyl-mandélique représente, chez le sujet normal, 75 à 80 p. 100 des catabolites excrétés dans les urines; les 20 p. 100 restants sont représentés par la métanéphrine.En outre, une fixation tissulaire à l’endroit même où ces réserves sont habituellement localisées est un processus physiologique d’inactivation des catécholamines. Enfin, une faible fraction de l’adrénaline est éliminée telle quelle dans les urines.3. Pathologie des surrénalesSyndromes corticosurrénaliensLes syndromes corticosurrénaliens observés en pathologie humaine sont très variés. On ne peut en donner ici qu’une vue sommaire et incomplète.Insuffisance surrénale lente. Maladie d’AddisonL’insuffisance surrénale à évolution lente peut résulter d’une destruction progressive des deux capsules par la tuberculose ou par des lésions dégénératives diverses. Elle réalise le tableau de la maladie bronzée décrite par Addison en 1855. Elle se caractérise par une fatigabilité musculaire très particulière, des troubles digestifs, une hypotension artérielle et un noircissement des téguments (mélanodermie) et des muqueuses. L’examen hématologique révèle une mononucléose avec éosinophilie. On note d’autre part un retard de l’élimination de l’eau, une baisse du sodium et du chlore plasmatiques, une élévation du potassium et une hypoglycémie. Mais l’exploration la plus sûre est le dosage des 17cétostéroïdes et des 17-hydrocétostéroïdes dans les urines. Leurs valeurs sont très basses, et elles ne se relèvent pas sous l’influence de l’ACTH. Cette dernière épreuve prouve le caractère primitif de l’insuffisance surrénale.Abandonnée à elle-même, la maladie aboutit à la mort en quelques années, soit dans un collapsus brutal, soit dans un état d’adynamie et de stupeur progressives, soit dans un coma hypoglycémique. Aujourd’hui, des survies indéfinies sont possibles, grâce à l’administration continue d’hydrocortisone, à la dose de 20 à 30 mg par jour, éventuellement associée à des injections bihebdomadaires de 5 ou 10 mg de désoxycorticostérone et, naturellement, à un traitement antituberculeux dans les cas fréquents où cette infection est en cause.Insuffisance surrénale aiguëUne insuffisance surrénale aiguë peut se manifester dans des circonstances diverses, principalement au cours d’infections aiguës (méningococcie) ou de maladies hémorragiques. Elle se traduit par des accidents dramatiques et souvent trompeurs, digestifs, respiratoires, nerveux, circulatoires. L’effondrement du cortisol plasmatique en est le témoin le plus sûr. Le traitement doit associer à une hormonothérapie massive les méthodes habituelles de réanimation et, naturellement, le traitement de la maladie causale.Insuffisances surrénales fonctionnellesIl existe des insuffisances surrénales fonctionnelles dues à un défaut de corticotrophine d’origine hypophysaire ou hypothalamique. Ces cas ne comportent pas de mélanodermie, et l’administration d’ACTH relève les éliminations urinaires des 17-cétostéroïdes et des 17-hydroxycétostéroïdes.Syndrome de CushingL’hyperfonctionnement global permanent de la corticosurrénale peut être dû au développement d’une tumeur bénigne ou maligne, généralement unilatérale. Plus souvent, il est lié à une hyperplasie des deux glandes, due à une production excessive d’ACTH ayant elle-même pour origine soit une tumeur de l’hypophyse à cellules corticotropes, soit un dérèglement hypothalamique. C’est à cette dernière éventualité que l’on réserve le nom de maladie de Cushing. Mais, quel que soit le primum movens de l’hypercorticisme, le tableau clinique est sensiblement le même, constituant le syndrome de Cushing.Il comporte une obésité à topographie facio-cervico-tronculaire très spéciale, avec rougeur intense des téguments et présence de vergetures pourpres; des troubles génitaux (aménorrhée ou impuissance sexuelle); un certain degré d’hirsutisme chez la femme; une hypertension artérielle; de la décalcification osseuse; de l’atrophie musculaire; des troubles de la glycorégulation de type diabétique, parfois des troubles psychiques.La preuve directe de l’hypercorticisme est fournie par la constatation de taux constamment élevés des 17-cétostéroïdes et des 17-hydroxystéroïdes dans les urines. Des dosages du cortisol plasmatique montrent d’autre part la perte du rythme circadien. Et surtout l’administration de déxaméthasone, même à de fortes doses, montre l’absence totale ou le caractère très incomplet du freinage des fonctions corticosurrénales.Abandonnée à elle-même, la maladie est grave, mortelle en quelques années. Son traitement varie avec la cause. Des explorations radiologiques, avec utilisation de méthodes de contraste, doivent être mises en œuvre pour déceler l’existence éventuelle d’une tumeur, soit de l’hypophyse, soit d’une surrénale dont il faut alors confier l’exérèse à un chirurgien. En cas d’hyperplasie bilatérale simple des deux surrénales, des résultats sont parfois obtenus par des irradiations de l’hypophyse au moyen du radio-cobalt ou de l’implantation intrasellaire de corps radioactifs (yttrium 90). Mais on est souvent amené à pratiquer l’ablation des deux surrénales, l’insuffisance qui en résulte étant alors compensée par un traitement hormonal substitutif. Mais des irradiations hypophysaires doivent compléter l’opération, afin d’éviter l’évolution ultérieure possible d’une tumeur hypophysaire à cellules corticotropes.Syndromes surréno-génitauxCertaines tumeurs corticosurrénales , bénignes ou malignes, au lieu de provoquer une hypercorticisme global du type Cushing, se traduisent en clinique par un syndrome virilisant avec pseudo-puberté précoce chez l’enfant, hirsutisme et aménorrhée chez la femme, ou par un syndrome féminisant avec gynécomastie chez l’homme. Ces cas comportent généralement une élimination urinaire de quantités très élevées de nombreux métabolites d’origine surrénale, androgènes, œstrogènes, prégnanestéroïdes et leurs précurseurs. Le traitement de ces tumeurs est essentiellement chirurgical, éventuellement avec une radiothérapie complémentaire. Certaines substances inhibitrices de la stéroïdogenèse peuvent être utilisées mais sont d’effet purement palliatif.L’affection connue sous le nom d’hyperplasie surrénale congénitale est une maladie d’origine génétique, liée au défaut d’une ou de plusieurs enzymes surrénaliennes nécessaires à la biogenèse du cortisol. Il en résulte une hypersécrétion hypophysaire d’ACTH, ayant pour conséquence une hyperplasie des surrénales avec surproduction d’hormones virilisantes et de métabolites précurseurs du cortisol. Cette affection se caractérise, chez les filles, par des malformations congénitales des organes génitaux externes, qui sont plus ou moins virilisés, réalisant le tableau du pseudohermaphrodisme féminin ou gynandroïde . Si l’enfant survit, la croissance est accélérée, et, dès l’âge de trois à cinq ans, apparaissent des signes de pseudo-puberté précoce de type masculin. Chez les garçons, il n’y a pas de malformations à la naissance, si ce n’est une hypertrophie du pénis, et l’anomalie ne se traduit que par l’accélération de la croissance et la pseudo-puberté, qui constituent un tableau dit de macrogénitosomie précoce . Dans les deux sexes, la soudure prématurée des cartilages de croissance aboutit à une taille définitive inférieure à la moyenne.L’anomalie surrénalienne est aisément mise en évidence par la constatation dans les urines de taux élevés de 17-cétostéroïdes, particulièrement de la déhydroépiandrostérone, et de quantités importantes de prégnantriol, métabolite intermédiaire dans la biogenèse du cortisol. Ces anomalies sont accrues par la perfusion d’ACTH, supprimées au contraire par l’administration de déxaméthasone. Elles sont le témoin d’un défaut congénital d’une 21-hydroxylase qui intervient normalement dans la synthèse du cortisol entre la 17-hydroxy-progestérone et le composé S (fig. 2).Le trouble de la stéroïdogenèse peut avoir encore pour conséquence, dès les premiers jours de la vie, une perte de sels entraînant des accidents graves, voire mortels, avec déshydratation rapide, hyponatrémie et hyperkaliémie.Un autre type d’anomalie, caractérisé par un défaut de 11- 廓 hydroxylase, s’accompagne au contraire d’une hypertension artérielle liée à l’excès, retrouvé dans les urines, de désoxycorticostérone et de tétrahydrodérivés du composé S.Toutes ces anomalies sont corrigées par l’administration de cortisone ou d’hydrocortisone, éventuellement associée à une surcharge saline, dans les cas avec perte de sels. Plus tard, un équilibre biologique convenable peut être assuré par la prise quotidienne de 0,5 à 1 mg de déxaméthasone. Mais, chez les filles, les malformations génitales peuvent exiger des corrections chirurgicales.Hyperaldostéronisme primaireCertaines tumeurs corticosurrénales, généralement petites et bénignes, provoquent une hypersécrétion isolée d’aldostérone (syndrome de Conn). Il en résulte une hypertension artérielle permanente et stable, avec augmentation du sodium et baisse du potassium dans le sang, augmentation de la clearance du potassium, polyurie et polydipsie. L’hypokaliémie entraîne des crises de parésie ou de paralysie musculaire, parfois des troubles psychiques. On note, d’autre part, une alcalose métabolique, avec élévation de la réserve alcaline et du pH sanguins, pouvant être cause de crises de tétanie.On constate dans les urines une élimination excessive d’aldostérone et de tétrahydroaldostérone. Mais le diagnostic peut être difficile avec certains hyperaldostéronismes secondaires ou certains syndromes hypokaliémiques d’autres origines.Le traitement comporte naturellement l’ablation chirurgicale de l’adénome surrénalien causal, après repérage radiologique.Syndrome d’hypersurrénalisme médullaireÀ partir des cellules chromaffines de la médullosurrénale peuvent se développer des tumeurs, bénignes ou malignes, dites phéochromocytomes , sécrétant de grandes quantités de catécholamines. Dans les cas les plus typiques, elles se traduisent par des crises paroxystiques d’hypertension artérielle, annoncées par une onde douloureuse angoissante se propageant des extrémités à l’épigastre, au thorax, à la tête, accompagnée de troubles vaso-moteurs, de sueurs et d’une élévation thermique. Partie d’un chiffre normal, la pression artérielle s’élève en quelques minutes à 20-12, 28-15 ou davantage. Les crises durent quelques minutes ou plusieurs heures, mais tendent à se rapprocher. Elles peuvent être l’occasion d’hémorragies rétiniennes, méningées ou cérébrales, d’œdème aigu du poumon, de mort subite ou d’insuffisance cardiaque progressive. Plus souvent, l’hypertension artérielle est d’emblée, ou devient, permanente, mais encore avec des poussées inopinées. Les paroxysmes hypertensifs s’accompagnent d’hyperglycémie, parfois de glycosurie, et, à la longue, peut s’installer un diabète permanent.En dehors des accès paroxystiques, il est possible de déclencher une crise hypertensive en administrant au sujet de l’histamine, du bromure de tétraéthylammonium ou du glucagon. Mais cette pratique est dangereuse. En présence d’une hypertension suspecte, il est préférable de pratiquer un test à la phentolamine (Régitine), substance adrénolytique qui, en faisant baisser la pression artérielle, prouve l’existence d’une hyperadrénalinémie. Mais la méthode de diagnostic la plus sûre est le dosage, dans les urines, des catécholamines ou de leur principal métabolite: l’acide vanillyl-mandélique. En cas de phéochromocytome, même en dehors des poussées hypertensives, on trouve dans les urines un taux de catécholamines largement supérieur à 500, 700 猪g, par vingt-quatre heures. Celui de l’acide vanillyl-mandélique est également très élevé, atteignant cinq à dix fois les valeurs normales.Le seul traitement efficace est l’ablation chirurgicale de la tumeur, préalablement repérée par une exploration radiologique utilisant des méthodes de contraste. L’opération peut être l’occasion d’incidents sérieux: crise hypertensive lors de l’abord de la tumeur, puis collapsus brutal après son extirpation. Une équipe expérimentée doit être prête à les prévenir ou à les combattre. Il n’est pas exceptionnel d’observer des tumeurs bilatérales, voire multiples, et parfois chez plusieurs membres d’une même famille. Des tumeurs analogues peuvent se développer hors des surrénales, le long de l’aorte abdominale et jusque dans le thorax, aux dépens de ganglions sympathiques contenant du tissu chromaffine: on les qualifie de paragangliomes.
Encyclopédie Universelle. 2012.